Quand la brume islandaise danse, la perspective se perd. Dépouillée de son contexte, une simple pierre devient montagne, un ruisseau, un fleuve impétueux. Armé d’un appareil photo, quel plaisir de traquer ces illusions sur la terre noire !
En cadrant habilement, en omettant les repères, on façonne ses propres Himalayas. L’œil se laisse volontiers tromper, le cerveau comble les vides. Clic.
Bienvenue dans le monde de Lushfoil Photography Sim. Un jeu à la fois minimaliste et somptueux, qui vous propulse dans des dioramas vastes, un reflex numérique à la main, avec un seul but : prendre des photos.
Un lac italien où les roches blanches se confondent avec la neige. Un temple japonais où le bois gris et la teinte beige d’une ville lointaine font flamber chaque porte rouge dans votre viseur. Les Alpes françaises, une plage australienne… De petits circuits de nature artistique, un terrain de jeu idéal pour la photographie, sans jamais vous imposer un cliché parfait.
J’ai arpenté pendant des heures ces espaces, même les plus petits, suivant des sentiers, croisant un lièvre furtif dans une forêt, ou encore deux distributeurs automatiques gardant une porte cadenassée. Je me disais attendre un instant, le moment !
Que la lumière et les angles s’alignent, révélant une image unique, visible d’un certain point de vue, et absolument incontournable.
LUSHFOIL PHOTOGRAPHY SIM | Bande-annonce de lancement
En réalité, je m’égare souvent, grisé par l’errance. Je fais le tour du lac italien encore et encore, fasciné par la façon dont le ciel s’étend et se replie, préservant l’illusion de réalité.
Je fais des allers-retours sur la plage australienne, scrutant l’arrière-pays, un fouillis d’arbres et de chemins potentiels, cherchant une fumée qui s’élève.
Mais voilà que je repère un détail singulier, et je me souviens du reflex dans mes mains. Un outil complexe, souvent intimidant, qui se révèle ici par étapes. Un bouton pour lever l’appareil à l’œil, une demi-pression pour la mise au point, une pression complète pour la photo.
C’est suffisant si vous le souhaitez, vous obtiendrez déjà de superbes clichés. Mais il y a aussi un bouton pour passer du mode paysage au mode portrait, un autre pour afficher les lignes de cadrage. Un troisième ouvre un monde de complexité photographique : vitesse d’obturation, ISO, ouverture…
C’est ce genre de choses qui a pu décourager des milliers de personnes de s’intéresser à la photographie. Ici, vous pouvez vous y plonger progressivement, tester les différents paramètres et observer les résultats. L’interface épurée encourage l’expérimentation, avant même de tomber sur un tutoriel.
Lushfoil est une excellente introduction à la photographie réelle. En tant qu’amateur de vieil Yashica TLR, je dois toujours avoir un pense-bête sur mon téléphone pour les ouvertures et les valeurs F.
Dans la réalité, j’utilise de la pellicule, coûteuse et limitée. C’est une autre raison pour laquelle Lushfoil est si généreux. C’est un jeu numérique sur la photographie numérique, où l’on peut prendre autant de photos que l’on veut et voir instantanément si elles sont réussies.
Lushfoil excelle dans l’errance contemplative, une promenade photographique dans des lieux magnifiques. Mais il y a plus à découvrir, et ces éléments ludiques s’intègrent de manière intéressante à la photographie.
Des objets à collectionner, comme d’autres appareils photo et des avions en papier à trouver. Des objets propres à chaque lieu, et un tableau de photos suggérées pour débloquer de nouvelles zones.
Je ne m’attendais pas à un système de progression, mais il fonctionne bien. C’est amusant de traquer les photos suggérées, et le système est assez souple pour vous encourager à réaliser votre propre version de l’image. C’est une excellente façon d’apprendre à connaître votre propre œil, votre propre vision photographique.
Au-delà de la chasse aux gadgets et aux panoramas suggérés, vous apprenez l’essentiel de la photographie : vous apprenez à être attentif, à scruter le monde qui vous entoure à la recherche de photos potentielles, à remarquer le plus de choses possible.
La nuit dernière, la quête d’une vue précise de la plage australienne m’a mené en territoire inconnu. J’ai tourné le dos au point de départ et pris la direction opposée à celle que j’emprunte habituellement.
Par-dessus les rochers, à travers une forêt clairsemée, jusqu’au point où je pensais que le jeu allait me faire rebrousser chemin.
Mais j’étais déjà sur la bonne voie. Après un rocher et quelques arbres, elle était là : une mini-plage, un croissant de sable blanc surplombant son propre petit océan. J’ai levé mon appareil, puis je l’ai abaissé. Comment capturer au mieux cet instant ?